3- Histoire de marques entre ethnocentrisme et cosmopolitisme: Le cas de la communauté en ligne de Gibson et Epiphone – Benoit Cordelier, Université du Québec à Montréal
Un instrument, au-delà de ses qualités matérielles, peut être considéré aussi comme un assemblage comprenant idéologies sociales et discours. Par ailleurs, une marque d’instruments peut être mondiale et pourtant rattachée dans l’esprit de ses amateurs à son pays d’origine. Le fait que ce dernier et le lieu de fabrication soient différents peut générer des discours ethnocentriques dans des communautés d’amateurs constituées pourtant de personnes de multiples nationalités, notamment en ligne. Gibson et Epiphone, célèbres marques américaines de guitares parmi les plus importantes productrices au niveau mondial, ont toutes deux été créées au tournant du XXe siècle pour devenir emblématiques de l’industrie de la guitare. Toutefois, suite au rachat d’Epiphone par Gibson, la production de celle-ci est délocalisée en Asie dès les années 70 pour faire face à la concurrence.
À l’aide d’une ethnographie en ligne et d’une analyse des discours portant sur les lieux de production, nous voulons explorer comme les amateurs de ces deux marques valorisent ces deux marques en fonction de leur origine historique américaine et de leurs lieux actuels de production (exclusivement les États-Unis pour Gibson, différents pays asiatiques pour Epiphone). Notre corpus est constitué de 219 fils de conversations extraits de la plateforme Gibson Brand Forums et qui s’étalent de septembre 2010 à juin 2018. Nos premières analyses montrent une appréciation différenciée des deux marques. Gibson, fait l’objet d’une exigence plus élevée, empreinte d’ethnocentrisme, en raison de son plus grand ancrage américain. Epiphone bénéficie d’une approche plus nuancée et positive, en dépit d’occasionnelles critiques ethnocentriques, où les racines historiques américaines se combinent à l’histoire des délocalisations avec ses différentes usines asiatiques.