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09.30  Le patrimoine photographique des ordres religieux catholiques français : héritage et identité (1890-1945)

What:
Paper
When:
9:00, Tuesday 7 Jun 2016 (30 minutes)
How:

L’histoire de la photographie a traditionnellement exclu l’histoire d’une photographie religieuse. Elle a fait une réalité historique d’un archétype du sens commun : l’incompatibilité de la technologie photographique et de la religion. Cependant, les archives photographiques des institutions religieuses indiquent une attitude inverse. La photographie est dès son invention largement employée par les milieux ecclésiastiques. Elle joue en particulier un rôle déterminant chez les missionnaires et dans l’illustration des grands hommes de l’Église. Cette assimilation se fait en continu et jusqu’à nos jours avec les histoires de la photographie professionnelle et vernaculaire.

Cette production est pourtant aujourd’hui encore majoritairement méconnue. Elle constitue un patrimoine que cette méconnaissance met justement en danger : archives mal conservées, vendues, ou encore jetées. À ce titre, la contribution d’Aude Maisonneuve au colloque Regards sur le patrimoine des congrégations religieuses, en 2011, révèle à la fois l’existence et les enjeux de conservation du patrimoine photographique des communautés religieuses. En se fondant sur l’exemple du carmel de Lisieux, ce texte montre implicitement qu’une telle reconnaissance est encore tributaire de l’intérêt du plus grand nombre, communauté des fidèles, voire des laïcs. En effet le cas des photographies de Lisieux profite très largement de la popularité de l’un de ses modèles, sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus.

Or, une étude approfondie du cas lexovien confronte immédiatement l’historien de la photographie, entendu comme agent de patrimonialisation, à deux corpus : celui des reliques, les portraits de sainte Thérèse, connus dans le monde entier, et faisant l’objet d’une véritable démarche de conservation ; et celui des documents photographiques contemporains, réalisés à la même période et par le même opérateur, Céline Martin (1869-1959), dont la circulation limitée et la transmission au sein d’un cercle restreint participent de l’identité d’une communauté familiale carmélitaine.

Au sein d’une histoire de la photographie religieuse qui reste aujourd’hui à écrire, la pratique photographique menée par les membres d’ordres religieux peut ainsi être comprise à la lumière d’une histoire de la photographie vernaculaire. Au-delà du carmel de Lisieux, cette nouvelle histoire souhaite démontrer un usage de l’appareil photographique reprenant les codes de la photographie laïque et particulièrement familiale, afin de créer et de conserver la mémoire et l’identité de la communauté, en particulier sous forme d’albums. La clôture carmélitaine contraint spatialement les prises de vue et impose une typologie de mises en scène. L’homogénéité apparente des clichés renforce ainsi l’objectif de ce corpus : témoigner d’une identité communautaire. Au sein de cette production photographique intime, une nouvelle signification apparaît lorsqu’un des membres de l’ordre, sainte Thérèse pour le cas de Lisieux, devient sujet de dévotions. Outils prosélytes, certaines photographies deviennent dès lors familières à un plus grand nombre, et ainsi plus promptes à obtenir la reconnaissance du statut de patrimoine. Lors de ce changement de fonction, les portraits photographiques de saints acquièrent un statut ambigu. Les négatifs uniques qui en sont à l’origine deviennent de quasi reliques de contact, méritant un soin spécifique et exceptionnel pour ce type d’objet documentaire.

Ainsi, si les photographies produites par une communauté apparaissent comme des agents de la mémoire, seules certaines pourraient par leur diffusion dépasser le statut de document lié à un groupe restreint, pour mériter une reconnaissance par le plus grand nombre de leur intérêt patrimonial. Tout l’enjeu d’une histoire de la photographie communautaire comme objet d’art vernaculaire apparaît ainsi, en ce qu’il pourrait permettre d’étendre cette reconnaissance et ainsi l’ampleur de ce patrimoine.

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