Conférence de Francesco Vigneri, Univesité de Rome, sur « Lampedusa et le "spectacle" de la frontière »
Quoi:
Talk
Quand:
9:00, Mercredi 14 Juin 2017
(1 heure)
Pauses:
Pause 10:00 AM à 10:30 AM (30 minutes)
Où:
MISHA (Maison Interuniversitaire des Sciences de l'Homme - Alsace)
- À venir (MISHA)
Comment:
Dr. Francesco VIGNERI, Université LUMSA, Rome
Résumé
Lampedusa et le "spectacle" de la frontière.
L’attention médiatique qu’a reçue Lampedusa au cours des dernières années par rapport au phénomène migratoire en a fait le symbole mondial de la frontière. Face à un flux croissant de migrants, la petite ile italienne – plus proche des côtes africaines que de l’Europe, dont elle est une frontière maritime suite aux accords de Schengen – a été dotée d’un système complexe de gestion, autour duquel gravite un microcosme de corps et dispositifs militaires et humanitaires. Les médias théâtralisent les effets de cette « frontiérisation », qui finit par façonner les discours et les pratiques de gestion du phénomène face à un large public très sensible au sujet de l’accueil ainsi qu’à celui de la sécurité. Ce spectacle de la frontière a des rôles précis: les intervenants « sauvent » les migrants, qui sont à leur tour soumis à une surexposition médiatique qui en rend inutile la parole, car ils sont visiblement des sujets désespérés, « en danger », mais aussi irrationnels, « dangereux », ne serait-ce que pour avoir risqué leur vie dans la tentative, par ailleurs illégale, de franchir nos frontières. Mais les migrants ne sont pas des sujets passifs ; ils cherchent à se faire entendre par des protestations, sit-in, grèves de la faim qui finissent pourtant par offrir un prétexte pour confirmer leur dangerosité, et légitimer aux yeux de l’opinion publique leur mise sous surveillance physique (dans un camp d’accueil) et juridique (par un permis temporaire). Sentiment collectif et mesures politiques se lient donc dans un rapport de conditionnement mutuel, qui se reflète dans les pratiques de gestion à la frontière ; celles-ci ont lieu face aux camera et finissent ainsi par influencer à leur tour ce sentiment et ces politiques publiques. Un cercle vicieux se reproduit alors au détriment des destinataires de ces politiques, les migrants, mais s’avère utile à la frontière, car il lui permet de regagner du terrain (sur le plan symbolique avant même que matériel) dans une époque qui se veut sans-frontières.
Notice biographique
Francesco Vigneri a soutenu en 2016 une thèse intitulée « Flux migratoires et processus interculturels dans les zones frontalières. Dynamiques communicatives et pratiques de reconnaissance à Lampédusa et en Sicile (2001-2014) », en cotutelle internationale entre l’Université Lumsa de Rome et celle de Strasbourg. Il a notamment publié "The interference of the mass media in the intercultural dialogue during the emergency landings in the Mediterranean: between reality and representation", Journal of Mediterranean Knowledge - JMK, 1(2), 2016 ; “Migrazioni e frontiere: dinamiche relazionali tra migranti e operatori nel palcoscenico del confine”, in Comunicazione, Intercultura e Organizzazioni complesse (ed. by F. Ieracitano), Rome: Edizioni Studiorum, 2017.
Résumé
Lampedusa et le "spectacle" de la frontière.
L’attention médiatique qu’a reçue Lampedusa au cours des dernières années par rapport au phénomène migratoire en a fait le symbole mondial de la frontière. Face à un flux croissant de migrants, la petite ile italienne – plus proche des côtes africaines que de l’Europe, dont elle est une frontière maritime suite aux accords de Schengen – a été dotée d’un système complexe de gestion, autour duquel gravite un microcosme de corps et dispositifs militaires et humanitaires. Les médias théâtralisent les effets de cette « frontiérisation », qui finit par façonner les discours et les pratiques de gestion du phénomène face à un large public très sensible au sujet de l’accueil ainsi qu’à celui de la sécurité. Ce spectacle de la frontière a des rôles précis: les intervenants « sauvent » les migrants, qui sont à leur tour soumis à une surexposition médiatique qui en rend inutile la parole, car ils sont visiblement des sujets désespérés, « en danger », mais aussi irrationnels, « dangereux », ne serait-ce que pour avoir risqué leur vie dans la tentative, par ailleurs illégale, de franchir nos frontières. Mais les migrants ne sont pas des sujets passifs ; ils cherchent à se faire entendre par des protestations, sit-in, grèves de la faim qui finissent pourtant par offrir un prétexte pour confirmer leur dangerosité, et légitimer aux yeux de l’opinion publique leur mise sous surveillance physique (dans un camp d’accueil) et juridique (par un permis temporaire). Sentiment collectif et mesures politiques se lient donc dans un rapport de conditionnement mutuel, qui se reflète dans les pratiques de gestion à la frontière ; celles-ci ont lieu face aux camera et finissent ainsi par influencer à leur tour ce sentiment et ces politiques publiques. Un cercle vicieux se reproduit alors au détriment des destinataires de ces politiques, les migrants, mais s’avère utile à la frontière, car il lui permet de regagner du terrain (sur le plan symbolique avant même que matériel) dans une époque qui se veut sans-frontières.
Notice biographique
Francesco Vigneri a soutenu en 2016 une thèse intitulée « Flux migratoires et processus interculturels dans les zones frontalières. Dynamiques communicatives et pratiques de reconnaissance à Lampédusa et en Sicile (2001-2014) », en cotutelle internationale entre l’Université Lumsa de Rome et celle de Strasbourg. Il a notamment publié "The interference of the mass media in the intercultural dialogue during the emergency landings in the Mediterranean: between reality and representation", Journal of Mediterranean Knowledge - JMK, 1(2), 2016 ; “Migrazioni e frontiere: dinamiche relazionali tra migranti e operatori nel palcoscenico del confine”, in Comunicazione, Intercultura e Organizzazioni complesse (ed. by F. Ieracitano), Rome: Edizioni Studiorum, 2017.
