Résistances photographiques : décoloniser et autochtoniser par l'image
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La photographie occupe une place complexe et singulière dans l'histoire de la colonisation et des rapports entre communautés autochtones et allochtones. En Amérique du Nord, le médium a largement contribué à la construction de ce que Daniel Francis a appelé « l’Indien Imaginaire » (1992). Même si quelques photographes autochtones se sont servis de l'appareil photographique pour représenter leur réalité sociale et culturelle dès la fin du 19e siècle, leurs images sont encore bien souvent inconnues du grand public. C'est à partir des années 1980, aux États-Unis et au Canada, que des photographes autochtones se sont réunis pour la première fois autour d'expositions collectives, dans une perspective de réappropriation et de renversement des représentations photographiques trop souvent essentialistes qui, historiquement, ont dominé le champ visuel. Les œuvres ainsi que le discours produit dans les publications qui accompagnent ces expositions font état d’un rapport politique et culturel spécifique à la photographie et témoignent d'une affirmation collective centrée sur la pratique photographique et l’appartenance à une communauté autochtone. En m'appuyant sur une sélection choisie de catalogues et brochures d'expositions collectives de photographes autochtones, j'examinerai la façon dont ces corpus photographiques permettent d'envisager le médium photographique comme un agent de décolonisation et d'autochtonisation. Nous verrons ainsi comment la photographie, à la fois comme image et comme pratique, peut constituer un outil de résistance qui permet de renverser les codes de représentation coloniaux et d'ouvrir un espace pour l'intégration des modes de connaissance et des visions du monde autochtones.