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15.30  L'appropriation citoyenne comme réponse à la sauvegarde de l’architecture moderne

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11:00, Saturday 4 Jun 2016 (30 minutes)

Cette communication propose de questionner l’idée de patrimonialisation comme condition sine qua non pour la sauvegarde de l’architecture moderne. Récemment, deux exemples ont démontré de manière tristement éloquente qu’un statut patrimonial ou une valeur artistique reconnue ne garantissent pas la rédemption d’œuvres bâties. Bien qu’elle ait bénéficié d’une citation en vertu de la Loi sur les biens culturels (2006), l’église Notre-Dame-de-Fatima à Jonquière (Léonce Desgagné et Paul-Marie Côté, 1962-1963) sera démolie après que la Municipalité de Saguenay ait abrogé ce statut qu’elle avait elle-même décerné. À Montréal, le Square Viger et particulièrement le secteur Agora et sa fontaine Mastodo (Charles Daudelin, 1983) sont menacés de démolition par la Ville sans égard à la valeur artistique reconnue et affirmée par de nombreux experts et musées nationaux. Ces deux réalisations seront vraisemblablement remplacées par des projets et aménagements des plus discutables, en totale contradiction avec la tendance actuelle d’architecture durable. À la vue de ces exemples, nous nous demandons effectivement – et avec une certaine ironie – ce que change le patrimoine ! 

Dans le contexte actuel, la patrimonialisation constitue-t-elle vraiment l’unique solution à privilégier ? À l’échelle citoyenne comment renouveler le paradigme du patrimoine afin qu’il s’intègre dans une culture commune, accessible au quotidien et qu’il influence à la fois notre rapport au passé, au présent et à l’avenir ? La diffusion des connaissances, la compréhension et la sensibilisation sont au cœur de la réponse que nous proposons. Nous le savons désormais, l’architecture moderne pâtit d’une méconnaissance qui explique en partie l’indifférence dont elle fait l’objet. D’un point de vue historique, le recul semble parfois trop près pour éveiller une sensibilité patrimoniale. Au-delà de la perception esthétique, peu de gens savent que l’architecture moderne a été générée dans un contexte de grands projets, que nombre de réalisations ont cherché à répondre de manière innovante aux besoins de l’époque en renouvelant les typologies ecclésiastiques, scolaires, institutionnelles, commerciales et résidentielles. Enfin, qu’elles ont contribué à démocratiser l’art public, à poser l’usager au centre d’expériences spatiales inédites. Si certains édifices proposent des caractéristiques esthétiques remarquables, d’autres sont plus « banals » et demandent une connaissance, voire une analyse architecturale, technique, typologique plus pointue. Ce « savoir en action » doit être au cœur du devoir pédagogique des experts auprès du grand public, afin de pouvoir comprendre, apprivoiser et expérimenter ces notions in situ. 

Notre démarche s’inspire de la réflexion de John Dewey (L’art comme expérience, 1931). De manière empirique, elle situe la connaissance, l’appréhension de l’art au cœur du sentiment d’appropriation collective, pour une meilleure démocratisation des œuvres (ici l’architecture moderne). Dans un premier temps, elle considère l’importance des citoyens et des organismes comme premiers gardiens de leur milieu de vie, en plus de privilégier l’implication des professionnels sensibles à une démarche de conservation. Dans un deuxième temps et dans la tendance actuelle de création durable, elle encourage la réalisation de projets innovants et respectueux de l’existant qui sont nourris par le savoir des experts, l’identification attentive des problématiques et l’écoute des besoins. 

Les réalisations précitées nous serviront de contre-exemples pour démontrer qu’un statut patrimonial (politique) n’est pas l’unique tributaire de la sauvegarde. Nous souhaiterons au contraire présenter le patrimoine sous l’éclairage innovant du développement durable enrichi d’une plus-value culturelle et, enfin, suggérer l’idée que parallèlement aux procédures de patrimonialisation, sa conservation pourrait être engendrée par une approche citoyenne qui allie conscientisation, appropriation et volonté de transmission.

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