Éducation institutionnelle et usage touristique d’un style de vie
Mon statut pour la session
Le patrimoine et le tourisme sont de vieux amis. Qui dit patrimoine évoque également la question touristique. En complétant le trinôme, les pratiques culinaires s’ajoutent et parlent d’une tendance mondiale dans laquelle la nourriture acquiert de nouvelles significations : d’abord par sa patrimonialisation et ensuite par sa touristification.
À ce titre, on ne peut comprendre le patrimoine alimentaire que par le rôle qui lui a été accordé et selon les intérêts qu’il sert, notamment du point de vue du tourisme. Inscrite en 2010 sur la Liste du patrimoine immatériel de l’UNESCO, la diète méditerranéenne est un exemple intéressant de patrimonialisation alternative. Il s’agit du premier patrimoine alimentaire diffus, puisque sept pays du pourtour méditerranéen ont porté le dossier conjointement à l’UNESCO. Par la nébulosité et la généralité de sa définition, cette pratique sociale qui va « du paysage à la table » rend compte aussi d’appropriations institutionnelles diverses, notamment de la part des institutions locales qui proposent des activités et des projets en son nom.
À travers un terrain ethnographique multisite entrepris en 2021 en Italie (Cilento), en Espagne (Soria) et en France (Marseille), j’ai tenté de comprendre quel regard l’institution locale de ces communautés porte à la diète méditerranéenne, et comment elle véhicule son message. Il est intéressant d’utiliser la voie comparative entre communautés épistémiques pour comprendre comment un écomusée à Pioppi, une fondation scientifique espagnole et un musée des cultures méditerranéennes basé à Marseille sont les garants institutionnels (mais non exclusifs) de la transmission de la diète méditerranéenne.
Tant pour la population locale que pour le visiteur, l’institution transmet un patrimoine immatériel à travers différents types d’éducation : alimentaire, sanitaire, muséographique et scientifique. Le but de cette présentation est de restituer comment les institutions s’approprient et territorialisent le patrimoine alimentaire et en font un usage touristique. En ce sens, se produit-il une cohérence conceptuelle entre le message de l’institution (et la mise en tourisme de la diète méditerranéenne) et la compréhension des touristes ? Au contraire, le résultat est-il un décalage de sens et d’interprétations de la diète méditerranéenne ? Finalement, arrive-t-on à mieux définir et à comprendre ce patrimoine porteur d’aussi denses significations et responsabilités ?