Conférence d'ouverture de Monique Hirschhorn : "Les langues ou la langue de la sociologie : un enjeu épistémologique"
La
sociologie s’écrit jusqu’à présent dans
les langues nationales et l’injonction de plus en plus fréquente à écrire dans
une langue commune, qui mettrait en cause ce pluralisme linguistique, est vécue
le plus souvent comme une contrainte imposée de l’extérieur et à laquelle il
conviendrait de résister. L’AISLF elle-même, bien que fondée sur le partage du
français, défend le maintien des langues nationales.
C’est ce choix que nous voudrions interroger, en examinant de manière aussi objective que possible les conséquences de la pratique du pluralisme : le maintien de sociologies nationales, la limitation de la diffusion, le problème de la traduction, la difficulté à développer des travaux comparatifs… ainsi que les justifications qui en ont été données.
Car ce qui est en cause n’est pas simplement un problème de communication, c’est bien le statut épistémologique initial de notre discipline, de ce langage sociologique qui emprunte à la fois à la science, à la philosophie et à la littérature. Passer à une langue commune, en l’occurrence un anglais qui est l’équivalent de ce que fut la koinè pour l’empire romain d’orient, serait faire le choix de la science, mais n’est-ce pas une trahison ?