Salifou NDAM est doctorant en sociologie urbaine au CRFD-SHSE de l’Université de Yaoundé 1 (Cameroun), Chercheur au Centre national d’éducation (CNE) et Chercheur au Laboratoire camerounais d’étude et de recherche sur les Sociétés Contemporaines (CERESC). Auteur de plusieurs articles scientifiques dans les revues et ouvrages à comité de lecture, il est également Membre de l’Association internationale des sociologues de langue française (AISLF). Sa thèse est intitulée : « Mobilités et violences urbaines au Cameroun. Analyse des formes de sociabilité dans les rues de Yaoundé et de Douala » (finalisée). salifndam@gmail.com
Passions et violences dans la mobilité urbaine à Yaoundé et Douala (Cameroun) : l’engagement du chercheur à l’épreuve de l’objectivation des données
Les rues des métropoles de Yaoundé et Douala, respectivement capitales politique et économique du Cameroun, sont les lieux de l’expérience directe, inédite et permanente des violences entre les acteurs de la mobilité urbaine (automobilistes, piétons, policiers, agents de régulation des municipalités, commerçants de rue, etc.). Ces violences, qui sont physiques, verbales, symboliques ou structurelles, s’appréhendent comme les manœuvres implicites de luttes politico-sociales et de revendication du droit à la ville des catégories sociales. Pour ces dernières, « faire violence » ou être violent au quotidien c’est d’abord défendre une posture idéologique qui dénote un certain militantisme social. Elles n’ouvrent alors leur « ventre » au chercheur que lorsqu’ils perçoivent chez lui une compassion ou un engagement personnel et social à leur endroit. Par conséquent, les expressions telles que « je vous comprends parfaitement », « je me mets à votre place » ou « je ressens votre douleur/situation » sont convoquées par le chercheur pour servir de courroie de collecte des données auprès des catégories sociales enquêtées. Cependant, une question d’ordre épistémologique se pose avec acuité, celle de savoir jusqu’où se limite l’engagement social du chercheur face à son devoir « sacré » d’objectivation des données du terrain de recherche ? Cette préoccupation est essentielle du moment où les émotions et les affects du chercheur se positionnent comme les éléments de négociation des données, même si l’analyse sociologique requiert d’office une distanciation par rapport à ces « cadres de pensée ». Dans ce cadre, l’objectivation des données a pour principe d’assurer un sens pratique aux données en les restituant dans leur contexte et en faisant preuve d’honnêteté intellectuelle, puisque le chercheur appartient avant tout à une catégorie sociale, une tranche d’âge, un mouvement politique ou social.
Mots-clés : mobilité urbaine, violences, passions, données, émotions, engagement du chercheur.