Corridors de déplacement et connectivité dans l'aire de répartition estivale du béluga du Saint-Laurent

Jean-François Ouellet, Robert Michaud, Michel Moisan, Véronique Lesage

Chez de nombreuses espèces fauniques, les habitats sont composés de zones de concentration reliées par des corridors, dont le trajet et l'utilisation devraient être bénéfiques dans de bonnes conditions d'intégrité du milieu. Mais dans un environnement fortement anthropisé, comme celui du béluga du Saint-Laurent, l'utilisation des corridors peut entraîner des effets néfastes lorsque des menaces sont rencontrées sur le trajet. Comprendre la connectivité des habitats est donc essentiel pour monitorer l'intégrité des habitats fauniques. Nos objectifs étaient 1) de vérifier l'existence et le trajet des corridors dans l'aire de répartition estivale de la population, 2) décrire leur utilisation par différentes classes d'âge et de sexe, 3) estimer la proportion de la population susceptible d’utiliser chaque zone de concentration à partir des patrons de connectivité, et 4) tester l'effet des facteurs environnementaux sur les déplacements des troupeaux et le trajet des corridors. Nous avons utilisé une base de données à long terme (~30 ans) des déplacements de troupeaux combinée à des estimations d'abondance spatialement explicites issues de relevés aériens. Nos résultats ont révélé un réseau de corridors reliés à une zone de confluence centrale autour de l'île Rouge et s'étendant dans le fjord du Saguenay et dans l'estuaire moyen et maritime. Ils ont aussi montré l'existence d'une ségrégation spatiale des sexes et classes d'âge. L'intégration des résultats de relevés aériens dans notre cadre de connectivité a révélé que la proportion de la population susceptible de visiter chaque zone de concentration est beaucoup plus grande qu’indiqué par les relevés aériens uniquement. Nous avons détecté une influence des courants de marée et de surface sur les déplacements des troupeaux mais aucune influence de la profondeur sur le trajet des corridors. L'application de cette approche contribuera à mieux évaluer l’exposition du béluga à des menaces naturelles ou anthropiques.