La manufacture des tabacs de Morlaix, en Bretagne, patrimoine industriel et diffusion de culture scientifique
My Session Status
What:
Paper
When:
9:30 AM, Tuesday 30 Aug 2022
(20 minutes)
Where:
UQAM, pavillon J.-A. De Sève (DS)
- DS-1570
Depuis 2019, avec la fermeture d’une usine à cigarettes à Riom, près de Clermont-Ferrand, l’industrie française des tabacs n’existe plus, une affaire dorénavant d’histoire, de patrimoine, de souvenirs et de mémoire. Monopole fiscal de l’État sous l’Ancien Régime et de nouveau de 1811 à 1995, cette industrie défunte nous lègue aujourd’hui une quinzaine d’anciennes usines et manufactures, bien documentées, protégées, pour certaines d’entre elles, au titre des monuments historiques et converties à de nouveaux usages : logements, locaux d’enseignement, hôtels, bureaux, lieux d’activité, lieux culturels...
La manufacture située dans le port breton de Morlaix, dont les bâtiments actuels remontent aux années 1730, cesse entièrement sa fabrication de cigares en 2004. Acquise par la Chambre de Commerce et d’Industrie de Morlaix, un programme mixte de reconversion est progressivement mis en œuvre, cherchant à en faire un nouveau morceau de ville. Le projet comporte un peu de logement, des locaux d’enseignement (un IUT), des bureaux, des lieux d’activités et, enfin, un espace muséographique. C’est la seule ancienne manufacture des tabacs, à ce jour, à comprendre un tel espace, antenne ici de « L’Espace des Sciences » à Rennes, centre de culture scientifique, technique et industrielle créée en 1984.
Se déployant sur 3 000 m2 autour d’une remarquable batterie de moulins installée vers 1870 pour réduire le tabac en poudre à priser, cet espace cherche bien évidemment à offrir des interprétations de l’histoire technique, sociale, architecturale et constructive des lieux et de leur place dans l’organisation nationale et internationale du monopole français des tabacs. Ce composant de l’espace projeté est particulièrement important pour le public de la communauté locale : depuis la fin du XVIIe siècle, la manufacture, successivement royale, impériale et nationale, a été le principal employeur de la ville et peu de morlaisiens n’ont pas de lien familial avec l’établissement.
Mais la belle époque de carte postales quand l’établissement donnait du travail à presque 2 000 ouvriers (surtout des ouvrières d’ailleurs, des cigarières), quand sa cloche rythmait toute la vie de la cité, cette époque s’éloigne : comment dès lors donner du sens à des visiteurs des jeunes générations ? Dans un parcours de découverte scientifique et technique, l’espace cherchera à conjuguer sciences et patrimoine industriel, donnant à réfléchir sur des thèmes comme les sources d’énergie et les mutations techniques, sur les principes mécaniques à l’œuvre dans les machines conservées, sur la botanique des plantes et sur le tabac enfin, matière première industrielle et produit de consommation dont le statut a évolué de remède miracle à poison mortel. Cet espace muséographique doit ouvrir ses portes au printemps de l’année 2021.
Paul Smith