Mourenx (Pyrénées-Atlantiques, France), ville-usine du gaz : entre résilience socio-économique et oubli patrimonial
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What:
Paper
When:
12:00 PM, Wednesday 31 Aug 2022
(20 minutes)
Where:
UQAM, pavillon J.-A. De Sève (DS)
- DS-1545
La communication proposée concerne la ville-nouvelle de Mourenx. Dans le cadre de l’industrialisation du bassin de Lacq, cette ville a été bâtie par les autorités locales de l’époque, sur le territoire communal du petit village de Mourenx. La population, installée ici pour travailler pour le compte des industriels, est concentrée dans ce tout nouveau centre urbain, qui dépasse vite les 10 000 habitants. La Société Centrale Immobilière de la Caisse des dépôts (SCIC) a construit cette ville entre 1957 et 1960, financée par les différents industriels, ce qui en fait une ville-usine presque caricaturale.
Un gisement de gaz est découvert en 1951 sur la commune de Lacq. La Société Nationale des Pétroles d’Aquitaine (SNPA), devenue depuis Total, est créée et a débuté l’exploitation industrielle de cette ressource en 1955. Des activités variées (traitement du Gaz, chimie, centrale électrique thermique, etc.) s’installent, constituant aujourd’hui quatre plateformes industrielles sur huit communes. Avant la construction de la ville-nouvelle de Mourenx, des cités ont été construites au sein de villages à proximité de ces plateformes. Les réserves de gaz étant limitées, la production est arrêtée le 14 octobre 2013, laissant un héritage actif (certaines usines sont encore en activité) et inactif à traiter.
Sortie de terre rapidement, la ville-nouvelle a été dessinée par l’architecte Jean-Benjamin Maneval, disciple de Le Corbusier. De nouveaux quartiers de cités de styles différents, ajoutés rapidement, ceinturent les immeubles collectifs du centre de la ville-nouvelle. Ils complètent le système industrialo-urbain composé d’un chapelet de sites industriels et d’une ville-usine principale : Mourenx.
Avec le départ des industriels historiques, la ville-usine est ainsi laissée orpheline de ses industriels créateurs. Cela ouvre la porte à une patrimonialisation de cet héritage exceptionnel mais non reconnu. En effet, ce type de ville-usine de la seconde moitié du XXème est particulièrement rare en France, mais il souffre d’une image rattachée aux grands ensembles de périphérie urbaine, caractérisés par un urbanisme de tours et de barres d’immeubles délaissés par le centre, alors qu’ici il s’agit d’une ville-usine à part entière au cœur d’un bassin industriel. Depuis 1975, la ville abrite le siège de l’intercommunalité qui s’est agrandie par élargissements successifs, dont le cœur est constitué de ce territoire fonctionnel, devenu territoire politique. La ville est donc pleinement intégrée au tissu urbain régional, tant au niveau démographique que politique. Cependant, tant sur la partie industrielle qu’urbaine de ce complexe hérité, la volonté de patrimonialiser n’arrive pas à
émerger dans ce territoire toujours très actif et économiquement résilient car proche de Pau et accueillant, dans cette vallée large du Gave de Pau, de nouvelles activités.
La méthode de travail est basée sur la lecture d’articles scientifiques retraçant l’histoire de ce territoire et d’un tour d’horizon des acteurs locaux montrant que la patrimonialisation en est encore à ses balbutiements. Il existe certes un désir de patrimonialisation manifesté par certains acteurs (habitants, associations, chercheurs, etc.), notamment un attachement à la présence des usines qui font partie de leur cadre de vie. Cependant, les volontés et actions politiques sont aux antipodes de ce désir : des immeubles collectifs de Mourenx ont été détruits. Le foncier est alors réemployé, dans le cadre des programmes de l’Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (ANRU) à laquelle la ville-nouvelle de Mourenx est inscrite. Les immeubles sont démolis pour construire une médiathèque, des espaces verts ou encore des petits collectifs.
Ce travail a donc pour objectif d’identifier les éléments à la fois spectaculaires et vernaculaires de cet héritage, d’évoquer les rares actions, notamment mémorielles, qui ont pu déjà être effectuées et, enfin, d’explorer des pistes de valorisation intégrant les problématiques de reconversion, patrimonialisation et redéveloppement territorial.