Les patrimoines de la santé aujourd’hui et demain : quelle ressource pour quels acteurs?
Mon statut pour la session
Certes l’avenir des patrimoines des hôpitaux et de la médecine paraît aujourd’hui fort incertain. Cependant, en France comme au Québec, la sauvegarde des patrimoines liés à la santé a suscité un réel intérêt dans les trente dernières années. Les recherches que nous conduisons depuis 1989 montrent qu’aujourd’hui, dans un nombre significatif d’expériences de valorisation, le patrimoine hospitalier n’est plus considéré seulement comme collections d’objets, mais tend à être utilisé par les acteurs sociaux comme une «ressource»: ressource culturelle et scientifique, pour les historiens et les chercheurs; ressource symbolique, pour les soignants; ressource communicationnelle et managériale, pour des directeurs d’hôpitaux; mais aussi ressource citoyenne pour la société civile.
La session proposée s’attachera à rendre compte d’actions culturelles qui démontrent que l’histoire et le patrimoine des hôpitaux, et plus largement de la santé, peuvent être utilisés pour faciliter la création «d’espaces de controverses» (Herreros 2004) entre professionnels (de la santé, de la culture, de la recherche), citoyens et usagers.
En particulier sera analysé le projet des Augustines du Québec de rassembler le patrimoine culturel de leurs douze monastères-hôpitaux dans le monastère fondateur de l’Hôtel-Dieu de Québec et d’y créer «un lieu de mémoire habité» (Robitaille 2008), qui contribue aux enjeux actuels des soins, en prolongement de leur héritage immatériel. Ce projet colossal a nécessité la rencontre, féconde et perturbante, d’univers culturels, institutionnels et organisationnels différents, qui n’ont pas toujours l’habitude de travailler ensemble, pour en arriver à une proposition mixte et diversifiée, qui associe l’histoire, l’architecture, la muséologie, l’entreprise touristique, l’hôtellerie, les causes sociales, la santé globale, etc. En lien avec le thème du congrès, ce projet illustre un changement de paradigme lorsque des continents souvent séparés se mettent au service de la sauvegarde et de la mise en valeur d’un des patrimoines fondateurs du Nouveau Monde. Fondamentalement, les Augustines souhaitent que le lieu dédié à leur mémoire soit un lieu d’accueil et de soutien pour les soignants d’aujourd’hui: un patrimoine qui prend soin des soignants. Mais comment transmettre un patrimoine hospitalier et religieux immatériel du «prendre soin» en tenant compte des contingences modernes?
Cependant, les usages sociaux du patrimoine requièrent à l’évidence qu’il soit conservé et transmis. Or, les difficultés actuelles de conservation conduisent à s’interroger sur la médiation numérique proposée dans le processus de patrimonialisation hospitalière. À partir d’une étude empirique avec analyse de bases de données, un panorama des formes et des limites actuelles de la mise en ligne des patrimoines de la santé en France sera donc dressé.
Dans l’immédiat, quatre communications (de six intervenants) sont prévues dans cette session. L’objectif étant d’échanger entre chercheurs et professionnels de la culture ou de la santé autour de recherches empiriques ou théoriques sur les usages sociaux du patrimoine, toute intervention en lien avec le thème du patrimoine ressource sera la bienvenue. Seront particulièrement appréciées les communications qui s’interrogeront sur l’avenir de la patrimonialisation des hôpitaux et de la santé.
Sous sessions
La question du futur de la patrimonialisation et de son influence sur les sociétés et les acteurs sociaux est au cœur des interrogations actuelles sur les patrimoines liés aux hôpitaux et à la santé. Certes l’avenir des patrimoines des hôpitaux et de la médecine paraît aujourd’hui fort incertain. Les deux plus grands musées hospitaliers français, celui des Hospices civils de Lyon (1936) et celui de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (1934), ont fermé leurs portes respectivement en 201...
Un espace public de la santé peine à se construire. Le débat, la controverse, naissent un peu partout et sur de nombreux sujets sans trouver à s’organiser, sans que la parole des citoyens, pas plus que celle des professionnels, ne parvienne à devenir force de proposition. Depuis dix ans, les « crises » ont balayé tout ce qui n’est pas directement « comptable ». Au-delà de ce que coûte sa préservation et sa présentation, le patrimoine s’est trouvé exclu des préoccupations hospitalières et s...
Pionnières du réseau de santé au Canada, les Augustines ont fondé douze hôpitaux. Aujourd’hui, en raison du vieillissement des sœurs, de l’intégration de leurs institutions au réseau public de santé et considérant la valeur de leur monastère fondateur (1639) du Vieux-Québec, elles ont relevé un pari visionnaire : restaurer ce bâtiment pour le protéger et le mettre en valeur, en plus de léguer leur patrimoine à la population, tout souhaitant qu’il contribue aux enjeux actuels de la santé. L...
Les Augustines souhaitent que le lieu dédié à leur mémoire — Le Monastère des Augustines (Robitaille, 2009) — soit un lieu d’accueil et de soutien pour les soignants d’aujourd’hui. Leurs pratiques, leurs convictions et leur vision des soins peuvent inspirer des pratiques non confessionnelles — bien qu’ancrées dans l’héritage augustinien — qui permettront de prendre soin non plus des malades, comme elles l’ont toujours fait, mais du personnel du milieu de la santé et des services sociaux. ...