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12.00  La truffe : le diamant de la cuisine fait-il « patrimoine » par-delà les frontières ? (cancelled)

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Depuis le milieu du dix-huitième siècle, alors que sa consommation est rapportée depuis l’Antiquité, la truffe est devenue un symbole majeur du luxe alimentaire et de la gastronomie européenne. Le « diamant de la cuisine » est un produit de distinction sociale par excellence et n’est travaillé en frais que par des restaurants haut de gamme. Au-delà de sa rareté et des mystères inhérents à sa production, la truffe et sa consommation sont entourées d’un imaginaire profondément enraciné dans les cultures occidentales, qui justifie pour bonne part le coût de ce produit, qui compte parmi les aliments les plus chers que l’on puisse trouver. L’ancrage de la truffe au sein des territoires semble être à la base de sa construction en tant que patrimoine : il s’agit d’un produit du terroir, récolté sous terre, à l’aide d’un animal, et pour lequel l’appropriation locale et les savoir-faire traditionnels apparaissent comme primordiaux. Cet ancrage social et spatial semble légitimer la construction de la truffe et de la trufficulture en tant que patrimoines culturels. Pourtant, la truffe en tant qu’appellation géographique n’est en rien une évidence dans les faits. Ses dénominations prêtent au contraire à confusion : la truffe « du Périgord » est majoritairement produite dans le sud-est de la France et la truffe blanche d’Alba se retrouve du Piémont italien aux Balkans. De plus, la découverte de la mychorhization a depuis les années 1970 permis la diffusion, hors des bassins trufficoles, des arbres potentiellement producteurs. De nouvelles régions de production émergent sur tous les continents et les transformations climatiques à l’échelle de la planète conduisent à cultiver les truffes dans des régions de plus en plus septentrionales et en altitude. L’aura de la truffe européenne semble transcender les frontières et elle devient un produit international. En Europe, cette déterritorialisation provoque, en réaction, des dynamiques de patrimonialisation, des résistances régionales et des revendications « protectionnistes ». Des demandes d’inscription des truffes à l’UNESCO sont formulées de part et d’autre des Alpes. On assiste à la naissance de nombreux marchés aux truffes et à une diversification d’un secteur qui se tourne vers le tourisme et les activités récréatives qui entourent le produit, telles que les visites de truffières et les stages de cuisine. Une communication importante se met en place et il en résulte un marquage de territoires en tant que « pays de la truffe ». Tandis qu’en Italie, en France et en Espagne, les régions traditionnelles subventionnent massivement la création de truffières afin de relancer la production, en chute libre depuis la Seconde Guerre mondiale, le Groupement européen « Truffe et Trufficulture » (GETT) travaille actuellement à la création de normes et d’appellations d’origine afin de protéger les marchés de l’importation croissante de truffes étrangères. Le conflit bat son plein, notamment, à l’encontre des truffes chinoises, qui par le nom « truffe » peuvent piéger le consommateur avec un produit bas de gamme, n’ayant que l’aspect des truffes gastronomiques. Mais dans le cas du marché et du « monde de la truffe », est-il possible de confiner une appellation à un territoire ? Quelles sont les réactions face à la déterritorialisation d’un patrimoine et quelles en sont les portées économiques et politiques ? La truffe, voire le mot « truffe », font-ils patrimoine en eux-mêmes, quelle que soit l’espèce ou la région de production, du fait des imaginaires attachés à cette icône de la gastronomie ? Que change la fabrique de la truffe en tant que patrimoine ou non dans les nouveaux ou les anciens territoires et à quels objectifs sociaux et politiques cela répond-il respectivement ?

Mathias Faurie

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