Une alternative habitante à la patrimonialisation institutionnelle : le cas de la Neustadt (Strasbourg, France)
Mon statut pour la session
Quoi:
Paper
Durée:
30 minutes
La _Neustadt_ est un terme allemand qui signifie la "ville nouvelle". A Strasbourg, elle fait écho à l’extension urbaine mise en œuvre pendant l’Annexion allemande de l’Alsace (1871-1918) suite à l’adoption du plan d’urbanisme daté de 1880. Cet ensemble urbain se réfère à la fois à une zone géographique et à une période historique de la cité. Les prémices du regain d’intérêt pour cette architecture ont été principalement initiées par une association militante, les Amis du Vieux Strasbourg. A l’époque cette initiative fut considérée comme une démarche alternative car elle considérait cet espace urbain incarnant l’annexion allemande comme un secteur valorisable d’un point de vue patrimonial. Depuis quelques années, les collectivités locales se sont emparées de la patrimonialisation institutionnelle de ce secteur urbain. Plusieurs actions menées par la municipalité et la Région Alsace contribuent à la fabrique de ce patrimoine (Heinich, 2009). Depuis l’automne 2010 et sur une durée de six ans, celui-ci est étudié par le Service de l’Inventaire qui a pour mission de recenser le bâti. Par ailleurs, la municipalité a effectué une demande de reconnaissance auprès de l’Unesco en 2015. Le but en est d’élargir le périmètre Unesco actuel - situé autour de la Cathédrale - obtenu en 1988 (Cassaz, Eberhardt, 2013). Se rajoute au dispositif le projet de révision-extension du Plan de sauvegarde et de mise en valeur de Strasbourg pour intégrer en partie cet ensemble architectural. Dans ce contexte d’institutionnalisation, cette communication vise à mettre en avant les démarches alternatives portées par les habitants et la société civile. Il existe une hiérarchisation entre les quartiers intégrant la _Neustadt_. A savoir que pour chacun des projets du dispositif patrimonial en cours, les périmètres diffèrent. La Région Alsace préfère s’appuyer sur le plan d’urbanisme et ne prend ni en compte la date d’élévation ni le type de construction. Le quartier dit allemand inclut ainsi des quartiers populaires (gare), un autre proche du centre-ville touristique (axe impérial) et des quartiers résidentiels bourgeois. La municipalité s’appuie, quant à elle, sur des périmètres bien plus restreints se cantonnant globalement à l’axe impérial déjà touristique et à quelques rues résidentielles. Ces frontières institutionnelles qui découlent de choix patrimoniaux aux enjeux différents sont particulièrement significatifs des effets d’inclusion/exclusion de zones urbaines. Si un cœur de la _Neustadt_ se dessine clairement autour des monuments historiques, les habitants des quartiers plus résidentiels en périphérie s’emparent ou tentent de se réapproprier la valorisation de leurs quartiers. Les associations de quartier jouent alors un rôle primordial ; elles proposent des actions alternatives et donnent la parole aux habitants notamment lors d’événements phares liés au patrimoine. Ces actions permettent de faire intervenir des citoyens dont les récits témoignent du phénomène de popularisation du patrimoine (Poulot, 2006 ; Rautenberg, 2010). A titre d’exemple, en 2015, l’association de la gare (AQHT) a proposé une visite alternative lors des journées européennes du patrimoine ; cette action promeut ainsi de nouveaux circuits de visite loin des sentiers traditionnels. Bien que diamétralement opposées d’un point de vue géographique et en terme de population, l’association du conseil des quinze (ADIQ), quartier aisé de la _Neustadt, _a organisé dans le cadre des rendez-vous annuels portés par la Région Alsace une rencontre entre résidents pour partager les expériences liées au vécu dans les immeubles wilhelmiens Il apparaît que les collectivités territoriales s’appuient sur ces associations pour proposer des actions alternatives aux discours officiels, sans en porter la responsabilité ni scientifique ni organisationnelle, testant d’une certaine manière de nouvelles approches patrimoniales Cette communication permettra d’identifier les points de tension et d’ajustement entre les habitants, les collectifs associatifs et les collectivités territoriales.