Les enjeux de la gouvernance de l’eau dans les pays du Sud à l’ère de l’Anthropocène - SESSION 2 de 2
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En collaboration avec le CentrEau, ce panel explore les convergences entre divers milieux hydriques vulnérables et menacés dans les pays du Sud global. Touchés par des accroissements importants de population ayant des besoins vitaux non comblés, ces milieux hydriques sont sensibles en raison de leurs caractéristiques physico-géographiques et par l’unicité de leur biodiversité. Ils sont à la fois menacés par les pressions d’origine anthropique et les risques naturels, exacerbés par les changements climatiques. Comment les innovations technologiques, la connaissance scientifique, les savoirs traditionnels et la participation citoyenne peuvent-ils apporter un éclairage afin de renforcer les résiliences des populations locales et appuyer les prises de décision des gouvernements locaux? En jeu, sont le bien-être des populations, leurs moyens de subsistance et la qualité des écosystèmes aquatiques, si ce n’est que la continuité de leur existence propre. Plusieurs composantes de ces écosystèmes sont menacées de disparition, ce qui inévitablement engendrerait des conséquences sur la vie dans ces milieux étant donné les interdépendances. Les conférenciers.ères de ce panel exposeront les résultats de leurs recherches en cours, utilisant des méthodes mixtes et touchant à une variété de pays en Afrique et dans les Caraïbes.
Le bassin du lac Tchad à l’épreuve du stress hydrique : quels impacts sur la coopération pour la gestion des ressources à l’ère de l’Anthropocène?
Inès Carine Singhe, M.Sc. Doctorante
Les défis de la gouvernance des bassins transfrontaliers dans l’Anthropocène sont multiples et complexes. Que ce soit pour les aspects théoriques et plus scientifiques de compréhension tels que les questions de principes, approches, méthodes, indicateurs, définition, discours, etc. ou des problèmes plus pratiques comme les usages, la disponibilité, les changements environnementaux et/ou climatiques, etc. les enjeux à prendre en compte sont multiples, multiscalaires et variables selon les contextes. Dans le bassin du lac Tchad, partagées entre le Cameroun, le Niger, le Nigeria et le Tchad; la gestion de la ressource en eau est l’un des défis majeurs à encadrer principalement en raison de sa vulnérabilité liée à divers facteurs physiques et anthropiques et de son niveau élevé de stress hydrique. En effet, depuis les 60 dernières années, le lac Tchad a subi une perte saisissante et alarmante de sa surface d’eau passant de plus de 26000 km2 en 1960 à moins de 1500km2 en 2018. (Unep, 2018). Est-ce que cette situation a une incidence sur la coopération pour la gestion des ressources en eau dans le bassin? Dans cette communication, nous présentons quelques résultats de notre étude qui a porté sur les impacts des changements environnementaux du bassin du lac Tchad sur la coopération pour de la gestion de ses ressources en eau. En nous appuyant sur une consultation de la littérature disponible documentant l’évolution de la coopération dans le bassin et sur des interviews, notre étude montre que dans le cas du lac Tchad, il ne semble pas y avoir de corrélation entre l’évolution de la coopération et l’état environnemental du bassin. Ce qui semble aller à l’encontre de certaines conclusions générales qui prônent l’idée que le stress hydrique conduirait forcément à des tensions riveraines et donc à un renforcement des dialogues et des stratégies de coopération. Notre étude montre aussi que les réactions des populations et des États riverains au stress hydrique du bassin ont un impact négatif sur la coopération entre les États dans le bassin mais, plusieurs autres enjeux socio-politiques et territoriaux semblent avoir des impacts davantage majeurs et déterminants.
Gouvernance et gestion des risques hydrométéorologiques au Sénégal : développement d’une approche pragmatique
RAYMOND KABO, M.Sc. Doctorant
Au Sénégal, plus précisément à l’ouest du pays, se trouve un ensemble hydrogéomorphologique de grande importance appelé le Plateau de Thiès. Ce bassin de vie accueille une diversité d’activités humaines qui dépendent de la présence de la ressource en eau. Cependant, depuis les années de grandes sécheresses dans le Sahel (1970), suivies d’un accroissement de la demande en eau dans la région, le Plateau connait un assèchement irréversible de ses hydrosystèmes de lacs et de petites rivières qui jouaient un rôle économique majeur pour les populations locales. Notre objectif a été alors de caractériser et de comprendre les mécanismes (physiques et humains) à l’origine de cet état d’assèchement des cours d’eau. La méthodologie proposée pour l’étude de l’assec est une approche mixte. L’outil créé pour comprendre l’état a permis d’identifier des convergences et des dissonances entre les composantes étudiées par les deux approches (physique-quantitatif vs humaine-qualitatif) afin de bien comprendre l’état de l’assec et de proposer des solutions adéquates.
Analyse de la vulnérabilité des écosystèmes et des populations de l'estuaire du Wouri aux aléas naturels
RAPHAËL ONGUENE, Ph.D.
Les zones côtières sont des excellents marqueurs de l’impact de l’anthropocène sur les écosystèmes naturels en zone intertropicale telle que les forêts de mangroves et les plages sableuses. L’avènement des villes avec un afflux humain important et en particulier sur le littoral représente parfaitement ce conflit entre l’humain et la nature. L’estuaire de Wouri au centre du Golfe de Guinée n’a pas pu échapper à cette triste réalité. La ville de Douala capitale économique du Cameroun, dont la croissance démographique est actuellement estimée à 110 000 habitants/an, se développe en dégradant les écosystèmes de mangrove le long de ses berges. La mangrove périurbaine de la ville de Douala a ainsi été détruite à plus de 70 % depuis 2015 (MINIDEP, 2017). On note davantage d’épisodes de précipitations intenses, de tempêtes et une élévation rapide du niveau de la mer. Les berges de l’estuaire du Wouri sont ouvertes sur l’océan Atlantique et sont également exposés à des épisodes d’érosion, de submersion lors de tempêtes et d’inondation à la faveur de crues.
Nous réalisons une cartographie des zones exposées aux inondations, à la submersion marine et à l’érosion côtière sur trois sites, à l’échéance actuelle et future (2037) et évaluons les indices de vulnérabilité. Les résultats de ce travail vont alimenter les plans d’aménagement de la ville de Douala. Les secteurs prioritaires pour l’implantation de solutions d’adaptation seront également déterminés en collaboration avec les acteurs locaux.
Proposition d'un modèle de gouvernance participative et inclusive favorisant l’accès à l’eau de la part des femmes à l’échelle du bassin versant en Haïti (1950-2020)
Olof SUIRE, M.A. Doctorant
L’accès à l’eau est la résultant de plusieurs formes de disponibilités. Qu’elles soient physiques, techniques, infrastructurelles ou politiques, chacune d’elles caractérise la quantité et la qualité d’eau que pourront jouir la population d’un territoire. En Haïti, presqu’ile montagneuse de la Caraïbe, l’eau ne manque pas (Magny, 1991, Thys, 1997). Paradoxalement, malgré sa richesse en eau, le pays se trouve tout de même dans une situation de stress hydrique (Bras et al., 2007; Emmanuel et Prévil, 2014). Ce stress affecte différemment les territoires et les catégories sociales. Les femmes et les filles sont parmi les personnes les plus touchées par rapport à division socio-économique du travail en Haïti. Les espaces urbains et ruraux ne sont pas exempts des effets différenciés de cet état de fait. Au regard de ce constat, notre travail de recherche s’intéresse principalement au premier élément du trinôme : politiques publiques, dispositifs techniques et disponibilité physique des ressources en eau sur le territoire Haïtien de manière générale et spécifiquement à l’échelle du bassin versant de la Grande rivière de Jacmel. L’objectifs est de déterminer d’une part, les effets des politiques publiques actuelles (ou de leur absence) en matière de gestion de l’eau pour les différents usagers de la ressource dans bassin versant à travers une analyse documentaire. D’autres part, il est question de voir comment la participation des usagers de l’eau, particulièrement les femmes, peut contribuer à une meilleure gestion de l’eau à l’échelle du bassin versant de la Grande rivière de Jacmel. Nous tiendrons compte à la base, du contexte éco-historique du territoire et le déficit de gouvernance auxquels résulte la dégradation de l’environnement du pays.