Variabilité du français parlé et enseignement de l’oral : quelques propositions pour une approche réflexive
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Variabilité du français parlé et enseignement de l’oral :
quelques propositions pour une approche réflexive
Le français se caractérise, comme toutes les langues vivantes, par une diversité des usages. Si la capacité à comprendre la langue parlée relève de mécanismes complexes, les auditeurs natifs rencontrent globalement peu de difficultés à identifier les mots dans le flux de parole. Les erreurs de compréhension concernent avant tout les homophones (Luce & Pisoni 1998). Des recherches récentes sur les confusions les plus fréquentes suggèrent que les difficultés à reconnaître un mot-cible peuvent être liées à une probabilité équivalente de plusieurs candidats qui se ressemblent sur le plan phonétique d’apparaître dans le même contexte (Goldwater et al. 2010).
Ces observations concernant la reconnaissance des mots en langue maternelle (L1) nous conduisent à nous interroger sur les mécanismes qui caractérisent la compréhension de l’oral en langue seconde ou étrangère (L2). On sait que notre système de perception de la parole dépend des spécificités de la langue maternelle, rendant ainsi difficile la perception de sons de parole ne respectant pas les schémas phonologiques aussi bien de la L1 que d’une variété régionale de cette même langue (Dufour & Nguyen 2008). En outre, l’apprenant est généralement focalisé sur la prononciation canonique. Or, dans la parole spontanée, les sons (ou segments) se chevauchent plus ou moins selon le débit. La prononciation canonique des mots peut également être altérée par des phénomènes de réduction qui sont d’autant plus fréquents que le style de parole est relâché (Meunier et al. 2006).
Pour aider l’apprenant à faire face aux multiples facettes de la langue parlée (accents régionaux, accents sociaux, phénomènes caractéristiques de la parole spontanée, registres de langue) auxquelles il sera confronté en interagissant avec des natifs, il paraît nécessaire de lui proposer un input adapté qui garantisse un certain degré de variabilité (Detey 2010). Or, la prise de conscience et la gestion perceptive de la variabilité des usages sont souvent reléguées à un apprentissage informel, en dehors de la salle de classe.
Un effort serait alors nécessaire pour faire évoluer les supports pédagogiques qui, à l’heure actuelle, ne permettent pas aux apprenants de se familiariser suffisamment avec le français parlé dans toutes ses dimensions (Falkert 2016).
À l’aide d’un test de compréhension auquel ont participé des apprenants anglophones et germanophones, nous avons pu identifier quelques traits du français parlé qui constituent un obstacle potentiel à la compréhension orale. Dans le cadre de cette communication, nous proposerons une analyse de certains traits relevant des dimensions diatopique et diaphasique. Dans un deuxième temps, nous discuterons les apports d’une approche réflexive en classe de langue qui vise le développement de stratégies d’analyse et de segmentation de la chaîne parlée, en essayant de répondre aux questions suivantes :
- Peut-on envisager un enseignement structuré qui dépasse la sensibilisation à la variation du français parlé ?
- Comment construire une progression qui tienne compte du lien entre perception et production de la parole ?