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Un patrimoine immatériel en réseau pour les « Manchester » d’Europe

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10:00 AM, Jeudi 1 Sep 2022 (20 minutes)
Les villes de Chemnitz (Allemagne), Lodz (Pologne), Manchester (Grande-Bretagne) et Mulhouse (France), ont connu un développement exceptionnel dans l’industrie et le commerce du coton très fortement lié à la chimie et à la mécanique. Outre les travaux sur le patrimoine industriel technique et bâti réalisé dans le cadre de la section « textile » du TICCIH, il est intéressant de se pencher sur le patrimoine immatériel important dans ces mêmes villes textiles. Parmi les pistes de réflexion proposées dans cette section, je m’intéresserai à la circulation des idées et des théories entre les villes textiles. Aux XVIIIe et XIXe siècles, la révolution textile, née au Royaume-Uni et à Manchester, a essaimé vers l’Est de l’Europe avec quelques décennies de décalage. Au XXe siècle, la crise de l’industrie textile est aussi partie des pays industrialisés vers l’Europe de l’Est, puis en Inde, en Asie, et en Afrique, continents qui concentrent aujourd’hui une grande partie de l’activité mondiale. Les villes textiles post-industrielles, ont réinvesti une partie des lieux qui subsistent. Mais le patrimoine industriel a d’autres formes. A Mulhouse, dès 1822 la première école de chimie française a formé des ingénieurs qui rejoignaient ensuite les manufactures textiles européennes. Dans son laboratoire de chimie, on venait apprendre les techniques d’ennoblissement des textiles. Des techniciens sont venus de Manchester à Mulhouse pour installer les machines achetées outre-manche, et des alsaciens se sont formés ou ont exercé à l’étranger : le chimiste Daniel Dollfus en 1843 dans la manufacture de Thomas Hoyle (Manchester), Théodore Schlumberger en 1844 pour les Ets de filatures et de tissage Pfatt (Manchester) ; Edouard Schwartz, très actif au sein de la SIM, a été coloriste à Chemnitz, l’ingénieur Charles Goerich a travaillé chez le constructeur de locomotives Richard Hartmann, également à Chemnitz. Les sections chimie et mécanique de la Société Industrielle de Mulhouse (SIM) publiaient les travaux des mulhousiens largement diffusés par ses correspondants des milieux universitaires et industriels en Europe. Les « Manchester » européens, d’abord nourris par leur modèle, ont ainsi tissé un réseau constituant un patrimoine industriel scientifique et technique immatériel. Aujourd’hui, les hommes et les machines textiles du XIXe siècle sont pour l’essentiel dans les musées industriels de plus en plus virtuels. Ils sont utilisés par les historiens ou comme ressource culturelle et pédagogique. Mais que reste-t-il alors de ce patrimoine industriel immatériel ? Est-ce que les réseaux construits au XIXe perdurent aujourd’hui ? Est-ce qu’ils continuent à produire des innovations dans les milieux industriels et scientifiques pour le patrimoine du XXIe siècle ? Bibliographie : Dominique Barjot, Transmission et circulation des savoirs scientifiques et technique, 2020. Donald S. L. Cardwell, The Development of Science and Technology in Nineteenth-Century Britain : The Importance of Manchester2003, Harold Irwin Dutton, The patent system and inventive activity during the industrial revolution 1750-1852, 1984 Petra Moser, Patents and Innovation in Economic History, 2016.

Pascale Nachez

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