Si le blé occupe une place mythique dans l’histoire de l’industrie au Canada, le pain et la boulangerie n’ont pas suscité le même intérêt. Témoin de l’époque artisanale, puis de l’industrialisation, le secteur du pain connaît aujourd’hui un retour à des modes de production préindustriels, dans la foulée de la « glocalisation » qui caractérise plusieurs produits alimentaires. Les études consacrées à la fabrication du pain se sont surtout intéressées au monde rural et à l’époque préindustrielle. Ainsi on a étudié les savoir-faire des meuniers d’autrefois et l’équipement de la boulangerie artisanale (fours à pain, moulins). Le patrimoine bâti plus récent témoignant de la minoterie et de l’entreposage du blé, par exemple les élévateurs à grains, a fait l’objet d’enquêtes et de diverses formes de reconnaissance. Tel n’a toutefois pas été le sort des traces laissées dans le paysage urbain par les boulangeries, qu’elles soient modestes ou plus importantes.

Cette proposition de session est liée à une recherche en cours financée par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Un de ses principaux objectifs est de contribuer à l'avancement des connaissances sur l'histoire et les patrimoines d'un produit et d'une industrie qui sont au cœur de l'alimentation et de la vie urbaine depuis des générations, soit le pain.

L’étude du patrimoine de l’industrie du pain offre l’occasion de se pencher sur les lieux, les personnes et les représentations dans le temps. Dans le cadre de cette session, les grandes étapes de l'évolution de la boulangerie, du petit atelier de fabrication artisanale à la production industrielle en usine, ainsi que les mutations des savoir-faire et de la main-d’œuvre qui y sont mobilisés, seront présentées. L'intégration de la boulangerie à des réseaux d'échange plus complexes, par l'étude des modalités d'approvisionnement de la métropole en blé et en farine, sera aussi examinée. Une autre présentation sera consacrée aux représentations culturelles associées au pain. Longtemps le produit de base du régime alimentaire des populations rurales et urbaines, le pain en vient à symboliser la subsistance elle-même. Transformé en produit industriel, il devient signe de modernité et d’américanité. Une troisième présentation se penchera sur les traces à la fois matérielles et immatérielles de cette histoire, notamment le patrimoine bâti associé à cette industrie et la mémoire de ses acteurs. Enfin, une dernière présentation permettra d’actualiser le legs de cette industrie en exposant les stratégies de communication et de mise en valeur des résultats de la recherche. Il sera question, entre autres, d’une importante exposition consacrée à l’histoire du pain à Montréal, qui permettra de rejoindre le grand public.